lundi 7 août 2000

Edéa

Le trajet entre Yaoundé et Douala comporte quelques agglomérations, la plus grande est Edéa, la ville lumière; elle hérite ce nom du barrage hydroélectrique qui y est construit et qui ravitaille tout le térritoire national en énergie électrique.
Nous arrivons à Edéa la nuit tombée, le bus fait un arrêt, ramassage oblige, quelques passagers en partance pour Douala grimpent dans le bus et prennent place, quelques vendeurs à la sauvette aussi, harcelant les passagers de leurs gourmandises aux milles odeurs. La spécialité locale est "le mintoumba", c'est de la pâte de manioc mélangée à de l'huile et du piment, enveloppée dans des feuilles et cuite à l'étouffée, je m'abstient d'en acheter, me contentant d'avaler de la salive.
Le bus repart finalement après un bon quart d'heure d'arrêt, avec la pénombre, on ne jouis pas totalement de la vue sur le pont sur la sanaga, ni de celle sur le barrage hydroélectrique. Nous arrivons au poste de péage, le deuxième depuis le point de départ, bien qu'isolé du centre ville, il y a de l'activité ici, beaucoup de commerçants; on remarque très vitre qu'on est en pays Bassa, le dialecte parlé ne trompe pas.
Le péage franchi, le bus entame sa dernière ligne pour Douala, entre ces deux villes il n y a pas d'autres agglomérations, donc pas d'arrêt. Le ronflement assourdissant du bus déchire la nuit silencieuse et ses phares tels une épée déchirent l'obscurité... Nous sommes encore en vie!

Je pars pour Douala

Il est 14h, je vais au commissariat de police afin de retirer mon récépissé de la Carte Nationale d'identité, je prend la route pour Douala tout a l'heure et parait il que sur cet axe là les contrôles de police ne badinent pas.
Je ne suis jamais allé a Douala, d'ailleurs je ne sais pas grand chose de cette ville là; ayant grandit dans la province du Centre, je connait juste Yaoundé et ses environ. Pour ce rendre à Douala à partir de Mbalmayo ou je suis en ce moment, il faut passer par Yaoundé, et compter environ 340 bornes selon mon livre de tourisme.
Je retire donc mon récépissé et me rend à l'agence de voyage après quelques timides au revoir à la famille. Je marche à pied avec sur mon épaule un sac de sport rafistolé contenant le peu de mes affaires, j'ai sur le dos un pardessus à la Colombo, un vieux jean et des sandales en caoutchouc. Dans les poches, j'ai la somme de 5500 F CFA, assez pour me permettre d'arriver à destination. Il pleut un petit peu et je marche lentement en regardant comme pour une dernière fois cette petite bourgade dans laquelle j'ai grandi... à cet instant précis, je ne sais pas trop a quoi je pense, rien de spécial, je suis à un moment de ma vie ou je suis comme à un carrefour et ne sachant quelle destination prendre.
J'arrive à l'agence, nous somme à la période des vacances et toutes les compagnies de voyages sont surchargées, il ya un monde fou, pas d'autobus, les passagers se comptent par centaines et le chargement par ordre d'arrivée... je suis mal barré, je voyage pour Yaoundé met 30 à 40 minutes, celui pour Douala en moyenne 3 heures... calcul rapide, j'arriverai à Douala la nuit, ma pire crainte! Tout mon esprit étant déjà à mon lieu inconnu de destination, il est donc hors de question que je reporte ce voyage à demain, j'achète donc un billet et prend place sur les bancs en bois disposés en guise de salle d'attente.
Plusieurs heures plus tard, un "gros porteur" en provenance de Yaoundé suscite des cris de joie dans l'assistance, c'est un autobus de 72 places, le fleuron de l'agence de voyage. L'appel est vite fait par un chargeur employé de l'agence qui déforme les noms dans un accent typique de la région, les bagages sont mis en soute et quelques minutes plus tard le véhicule s'ébranle de nouveau sur l'axe, direction Yaoundé...
Le voyage pour la Capitale se passe sans encombres, nous arrivons à Mvan, le nouveau secteur de recasement des agences de voyage, elles ont été expulsées du centre ville pour cause d'embouteillage. Je descent à "Félicité Voyages", la première agence rencontrée, elle serait la moins chère selon les conseil des tiers glanés dans le bus. Pas terrible, Félicité Voyages", c'est un grand espace de terre rouge propre à Yaoundé, avec quelques bosquet par ci par là, deux épaves calcinées de bus et une barraque délabrée en guise de bureaux. Je m'approche, assez habitué à ce genre de scène. Au guichet il ya une jeune dame, à elle seule elle illumine tout le coin avec sont teint clair, elle me plaît, sympa en plus. J'achète un billet pour Douala à 2500 FCFA et lui demande la durée du voyage; "Trois heures" me répond-elle d'une voix douce, je le savait déjà mais j'espérait qu'elle m'anoncerait moins de temps; il commence à faire sombre et il n ya toujours pas de bus en provenance de Douala et qui fera le voyage en sens inverse, avec probablement le même chauffeur... que Dieu nous protège.
Mes intestins commencent à ce nouer, car je crains vraiment d'arriver à Douala la nuit, on m'a raconté tellement d'histoires macabres sur cette ville là que j'ai l'impression qu'au moment ou je descendrait du bus, une horde de bandit m'assaillira, me dépouillera et zigouillera...
Il est 19h40 et enfin se pointe dans un vacarme de ronflement de moteur le fameux bus tant attendu, il ne paie pas de mine et à le voir on se rassure en se disant que c'est Dieu qui nous conduit. Le chargement est vite fait, d'ailleurs il n y a pas beaucoup de passagers. Tout le monde à bord, le bus prend la route dans un grondement, tel un corbillard conduisant ses passagers à leur dernière demeure.
Je n'ai jamais fait de long voyages et celui ci commence vraiment à m'ennuyer, au bout d'une heure, je commence à manifester mon impatience, mon voisin qui semble avoir compris mon problème me rassure en disant " on n'est pas encore arrivé, c'est encore loin"; pas de quoi m'aider. Il fait nuit et on ne voit pas grand chose de la route ni du décor, sous les phares de la voiture, on distingue à peine une piste sinueuse et monotone, sans signalisation quelconque ni marquage au sol, c'est cette piste qui est appelée "AXE LOURD", elle serait même la nationale N°2 sur le réseau routier du Cameroun. De temps en temps, des automobilistes roulant dans la directin opposée nous éblouissent avec leurs antibrouillards, un camion roulant à son rythme nous aveugle avec son smog, vu le ronflement de notre bus, on doit surement en faire de même à l'arrière. On traverse des petites localités, des vendeurs à la sauvette nous harcelent avec leur marchandises, des fruits, des friandises, de la viande à la braise; je suis charmé mais je ne peux rien acheter car je suis dans mes retranchements financiers, je me contente donc de juste avaler de la salive devant ses aliments à l'hygiène douteuse.